CAHIERS D'ENQUÊTES POLITIQUES



Rendre d'autres vies possibles,
voilà une guerre que l'on peut mener sans crainte, parce que son commencement en constitue la première victoire.

Peut-être qu'il faudrait commencer par le milieu, même si cet adage a fini par devenir un slogan qui s'applique à tout et n'importe quoi.
On le sait: la plus redoutable des polices est celle qui engendre l'environnement qui nous fait exister en tant qu'espèce depuis l'évidence du chaos climatique.
N'est-on pas arrivé au point crucial où, pour la première fois dans l'histoire terrienne, nous autres humains, sommes devenus ce qui globalise la terre pour la constituer en monde Un? Contre la pacification policière, la communauté est d'abord l'affirmation de vies incommensurable : c'est par la richesse de nos mondes, par la densité des rapports qu'ils entretiennent que nous pouvons défaire à chaque fois l'administration de la vie. Ne faudrait-il pas alors se risquer dans l'aventure d'une nouvelle fragmentation du monde, avec ses modes de vie singuliers?

Nous avons payé très cher par le passé la quête de déterminations historiques d'un monde Un, celui de nous éloigner de l'infinie variété des relations entre les êtres qui habitent la multiplicité des mondes.
Nous ne vivons pas une perte de sens mais la perte d'un sens de l'orientation qui nous permet de naviguer entre les lieux et d'y éprouver une présence commune. Nous voudrions hériter de la vérité déchiquetée d'un monde en processus, abandonner le culte du sujet connaissant comme 'unique propriétaire' pour faire place à une communauté d'explorateurs. C'est en renonçant à la quête d'une vérité fondamentale que des rencontres pourront encore avoir lieu.

Commencons donc par le début, c'est à dire par le milieu, c'est-à-dire par des rencontres.
Ces cahiers ne représentent pas un programme, mais une invitation au voyage ou au parcours d'un archipel. Des manières de faire collectif et des manières de raconter. Nous nous sommes donnés pour consigne le partage du récit, en qualité d'écoute et de parole. Tout cela s'articulait autour du langage. On en revenait toujours aux mots, une multitude: personne ne faisait le monde, ne disait le monde; il était. Il agissait. Et les êtres humains le faisaient exister en tant que monde humain, par le langage. Celui d'un peuple de connecteurs qui le tissent pour tracer des itinéraires dans le monde. Ce sont là des récits toujours en cours d'élaboration, qui soutiennent des pratiques elles-mêmes changeantes, qui n'ont pas vocation à en épuiser le sens mais à en nourrir ailleurs beaucoup d'autres.

A nous de rendre possible d'autres devenirs.




pix684
posture13s